Comment les stratégies d’intégration travail-vie personnelle affectent-elles le bien-être des employés?

 
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Il y a quelques mois, en juillet 2016, on vous parlait de la conciliation travail-vie personnelle. On a abordé dans cette chronique les notions de conflit et d’enrichissement entre les différentes sphères de vie, de même que les préférences de segmentation et des stratégies d’intégration.

Voici un bref rappel des notions qui seront discutées dans la présente chronique. On utilise des stratégies d’intégration lorsqu’on mélange nos vies professionnelle et personnelle dans un même lieu (p.ex. : travailler à la maison) ou durant une même période de temps (p.ex. : prendre ses rendez-vous médicaux durant ses journées de travail). L’intégration de nos différentes sphères de vie se fait donc sans délimitation précise de temps et d’espace réservée pour chacun. Par exemple, la technologie (téléphones cellulaires, tablettes électroniques, etc.) nous donne la flexibilité de répondre à des messages textes, courriels et appels professionnels en dehors des heures de travail, en télétravail, tout en nous permettant de faire la même chose au bureau pour les communications personnelles. Bien que très pratique, la technologie est un outil à double tranchant parce que, par exemple, cela crée des attentes (et par le fait même, de la pression) d’être disponible en tout temps pour répondre immédiatement à ses courriels, même en dehors des heures de travail.

Il y a en effet des avantages et des désavantages à intégrer ou segmenter nos différentes sphères de vie. Nous avons donc mené une nouvelle étude afin de mieux comprendre les conditions dans lesquelles les stratégies d’intégration permettent un plus grand bien-être. Qu’est-ce qui viendrait jouer un rôle important dans la relation entre les stratégies d’intégration et le bien-être des travailleurs?

L’importance de l’autonomie

Notre hypothèse était donc que les stratégies d’intégration mèneraient à plus de bien-être quand les travailleurs perçoivent un certain niveau de contrôle sur celles-ci. En effet, dans la chronique  de septembre 2016, Julie Lauzier nous expliquait l’importance de la théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan, 2000) dans nos actions, et notamment, l’importance de la satisfaction du besoin d’autonomie. On y expliquait qu’afin de satisfaire son besoin d’autonomie, il fallait être à l’origine de nos propres actions, c’est-à-dire d’être en mesure de mettre en application les choix que l’on fait ou que l’on désire faire, d’être fidèle à notre volonté ou du moins d’être en mesure de choisir les moyens entrepris pour répondre à une situation. La satisfaction du besoin d’autonomie permet une meilleure motivation, un meilleur bien-être, etc.

Quels sont les résultats?            

Les résultats de notre étude (Leduc, Houlfort, & Bourdeau, 2016), menée auprès d’environ 300 travailleurs de différents milieux, suggèrent en effet que de sentir qu’on a le contrôle sur la gestion de ses vies professionnelle et personnelle amène plus de vitalité, de satisfaction de vie et de satisfaction au travail et ainsi donc, amène un plus grand bien-être en général. De plus, lorsqu’un individu intègre son travail dans sa vie personnelle (stratégie d’intégration) et qu’il sent qu’il a le contrôle, il aura une plus grande satisfaction par rapport à sa vie en général que lorsque le travailleur n’a pas le contrôle sur cette stratégie d’intégration.

Les résultats suggèrent également que l’intégration du travail dans la vie personnelle permet au travailleur de se sentir plus satisfait au travail. Cependant, les résultats suggèrent aussi qu’une trop grande intégration de son travail dans sa vie personnelle pourrait mener à des problèmes de santé physique. Les travailleurs qui ont plus de contrôle sur leur horaire de travail ont tendance à finir par travailler plus que ceux ayant moins de contrôle (; Chung, 2016). Ceci expliquerait bien les résultats que nous avons trouvés, à savoir qu’après un certain point, intégrer son travail dans sa vie personnelle pourrait causer plus de problèmes de santé physique, possiblement parce que les travailleurs n’auraient pas assez de temps pour récupérer entre leurs journées de travail.

Par contre, à l’inverse, intégrer sa vie personnelle dans son travail n’a pas démontré de lien avec les problèmes de santé physique. Ceci pourrait être expliqué par le fait que cette direction de la flexibilité (amener la vie personnelle dans le travail) permet plus facilement, par exemple, de prendre des rendez-vous chez le médecin et donc de prendre soin de soi et de diminuer l’importance de ses problèmes de santé). De plus, les gens qui intègrent dans cette direction sont plus satisfaits de leur vie.

Et alors?

Tous ces résultats, pris ensemble, mettent en lumière l’importance de ressentir un certain niveau de contrôle sur les stratégies d’intégration utilisées afin de permettre un plus grand bien-être. Comme quoi la populaire citation de James Dean « Puisqu’on ne peut pas changer la direction du vent, il faut apprendre à orienter les voiles. » pourrait prendre tout son sens, pourvu qu’on ajuste les voiles en fonction de ses préférences personnelles afin de satisfaire son besoin d’autonomie.

Caroline Leduc

Chroniqueuse de Secret de nerds – Altius

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Références :

  • Leduc, C., Houlfort, N., & Bourdeau, S. (2016, Juin). How integration strategies affect workers’ well-being: The moderating role of boundary control. Communication par affiche présentée à la 2016 WFRN Conference de Work and Family Researchers Network (WFRN), Washington, D.C.
  • Chung, H. (2016). Flexible working is making us work longer. The Conversation. Repéré à http://theconversation.com/flexible-working-is-making-us-work-longer-64045
  • Ryan, R. M., Patrick, H., Deci, E. L., & Williams, G. C. (2008). Facilitating health behaviour change and its maintenance: Interventions based on self-determination theory. European Health Psychologist10(1), 2-5.

 

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